Focus : comment sont choisies les personnes que nous allons pouvoir aider
Depuis le début de l'année 2021 Toit à Moi a accueilli 4 personnes et 4 autres appartements seront disponibles dans les prochaines semaines. Qui sont ces personnes, comment arrivent-elles jusque sous nos toits, comment l'association choisit-elle celles que le dispositif Toit à Moi aidera vraiment à changer de vie ?
Le point avec Béatrice Goubault-Moulin, directrice des opérations chez TAM.
Avant de comprendre comment nous choisissons les personnes que nous allons aider, il faut comprendre quelle est notre offre. Peux-tu nous l’expliquer en quelques mots ?
Notre offre est globale, elle a pour ambition d'aider la personne accueillie à changer de vie, alors "on met le paquet" avec l'ambition d'un effet tremplin ! Ce n’est pas qu’un logement, même si c’est primordial, c'est un joli appartement confortable, bien meublé et bien placé. Ce n’est pas qu’un accompagnement, même si c’est fondamental, c'est le professionnalisme, la persévérance et aussi l'exigence d'un travailleur social qui se consacre en moyenne à seulement 5 personnes. Et ce n’est pas non plus que du lien social avec des bénévoles, même si c’est encore plus fondamental, au travers des rencontres, des activités, des repas partagés, des longues discussions, des rires, des pleurs, c'est une famille qui se crée, qui fait se sentir vivant et entouré. Toit à Moi, c'est tout ça à la fois, c'est donc du temps, de l'énergie, de l'argent... On investit et on essaye de trouver la personne qui va "en profiter" le plus, à son rythme... c'est une question d'adéquation entre l'offre globale de TAM (un chouette appartement, un accompagnement intense, de nouvelles amitiés) et la demande de la personne sans-abri ou mal logée, dépassée par des problèmes de toutes sortes (santé, droits, finances,...), isolée.
Les 3 piliers de notre action
Quelles sont les limites de Toit à Moi ? Quels types de profil ne pouvons-nous pas prendre en charge ?
Nous nous adressons à des personnes qui peuvent vivre seules et en sécurité dans leur appartement, qui sont un minimum autonomes pour les actes du quotidien même si - après des mois ou des années de rue - il faut réapprendre certains réflexes. Nous ne sommes pas un établissement de soins, nous ne pouvons pas et ne souhaitons pas mettre en place un système d'astreinte, nous ne pourrions donc pas accueillir certaines personnes souffrant de pathologies psychiatriques sévères par exemple ou encore ayant besoin de soins spécifiques. Nous ne serions de toutes façons pas la bonne structure car l'équipe est composée d'éducateurs expérimentés mais nous n'avons pas de personnel soignant. Pour les personnes que nous accompagnons, nous travaillons en réseau. Selon leurs besoins, nous les mettons en relation avec des professionnels partenaires, dans certains cas une cure peut être proposée pour aider à soigner un problème d'addiction par exemple, la personne quitte alors son appartement TAM le temps qu'il faut. Nous sommes organisés en antenne (1 travailleur social, 5 logements, 5 personnes accompagnées), c'est une structure légère et agile, qui permet de faire du sur-mesure, de s'adapter, de tester en mode projet, par contre on ne sait pas tout faire et il faut en être conscient pour ne pas mettre en danger les bénéficiaires, les salariés, les bénévoles. Nos travailleurs sociaux ne sont pas des supers héros et pour certains profils, on ne sera pas la bonne proposition. Il faut arriver à les repérer...
La personne accompagnée doit pouvoir être autonome dans son quotidien
Un appartement vient de se libérer… Comment sera choisie la personne ou le foyer qui pourra en bénéficier ?
Quand une place se libère ou que l’on acquiert un nouvel appartement :
1) on en fait part à nos partenaires sociaux (assistants sociaux, associations, samu social, centre communal d’action sociale, etc…) dont le job c’est d’aider les gens en situation d'exclusion et de précarité. Ils nous connaissent et savent quels types de profils nous pouvons accueillir,
2) ils nous envoient alors des dossiers correspondants plus ou moins à nos critères.
3) Ces dossiers sont étudiés par le responsable de l'action TAM de l'antenne concernée et son binôme, ils font une première sélection et reçoivent des personnes en entretien. Pour 1 place, ils rencontrent en moyenne 3 personnes et vont chercher à bien comprendre les situations, les attentes, les enjeux, l'urgence, les alternatives.
4) Après ces entretiens, ils vont présenter les dossiers et leurs ressentis à un comité de validation.
Ce comité est composé d’une personne de la direction de l’association, 1 bénévole de l'antenne, et 1 ou 2 personnes extérieures, par exemple un psychologue, un(e) bénévole dans une autre asso, un(e) responsable de centre d'insertion, un(e) mécène… en somme quelqu’un qui, nous connaissant bien, va chercher à nous challenger (avez-vous vraiment les moyens de l'aider ? êtes-vous bien adaptés ?), à nous alerter le cas échéant. L’objectif de ce comité est à la fois de croiser les regards sur les situations et de porter la décision souvent difficile à plusieurs. On échange et on se met d’accord en tenant compte aussi des urgences, de l'existence d'alternatives pour certains et en tentant de préserver la diversité des profils au sein de l'antenne car c'est une richesse et un gage d'équilibre. Cela n'a jamais été nécessaire mais le cas échéant le responsable de l'action TAM qui va accompagner la personne choisie et la direction de l'asso ont un droit de véto.
L'objectif du comité de validation est d'arriver à détecter la personne dont la demande est la plus en adéquation avec ce que nous proposons. La demande d'un logement ne fait jamais débat malheureusement, il est plus difficile d'évaluer l'envie d'être aidé, accompagné, entouré pour réussir à changer de vie mais grâce aux riches échanges au sein du comité, on y arrive !
Dans tous les cas, le processus ne doit pas être trop long car les personnes qui ont besoin d’aide sont fragiles et dans des situations très précaires, il faut être efficace.
Comité de validation sur Nantes, en début d'année. Il a permis l'accueil de 2 personnes.
Régulièrement, des personnes nous contactent car elles connaissent quelqu'un en grande précarité et souhaiteraient pouvoir l’aider… Quelle réponse pouvons-nous apporter ?
En effet, cela arrive souvent. Et c'est très frustrant... Aujourd’hui, nous avons 48 appartements, ils ne restent jamais vides bien longtemps, donc malheureusement la plupart du temps on ne pourra pas prendre en charge cette personne… mais on pourra parfois l'orienter vers une autre structure. Dans tous les cas, on prend contact avec le travailleur social qui la suit pour lui expliquer qui nous sommes, comment nous fonctionnons et nous convenons de l'informer lorsqu'une place se libèrera. Nous n'avons pas de liste d'attente et nous nous adaptons aux situations qui nous sont transmises pour un appartement donné, une personne qui n'aurait pas été retenue pourra toujours postuler de nouveau si sa situation ne s'est pas améliorée.
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Pour pouvoir répondre plus souvent positivement lorsque nous sommes ainsi sollicités, pour aider davantage de personnes en les logeant et en les accompagnant vers un changement de vie pérenne, nous devons acheter plus d'appartements donc avoir davantage de parrains et de marraines qui donnent chaque mois 20€ (soit 1€ par semaine après réduction d'impôt).
Parlez-en autour de vous, c'est important !